Témoignage sur les livres objets
--> Exposition « Livres objets »
Exposition « Livres objets » de Marie-Christine Bourven et de l’Atelier Recto-Verso à la médiathèque du Faubourg de Béthune à Lille (du 08/10/04 au 05/11/04), faisant partie de la thématique « Livres d’artistes », dans le cadre de Lire en Fête.
L’univers de Marie-Christine Bourven est ludique, poétique, onirique, mystérieux... Elle surprend à exploiter des matières inattendues et joue avec les formats, sans faire de discrimination entre les grands et les petits. D’ailleurs, son travail s’adresse autant aux adultes qu’aux enfants. En effet, alors déjà émérite en gravure, Marie-Christine Bourven s’est installée à Reims dans les années 90 et a décidé de donner à son art une dimension plus légère, en quelque sorte, en s’intéressant à ce que pouvaient faire des enfants en utilisant la gravure, et en animant des séances à l’Atelier Recto-Verso. La Médiatèque du faubourg de Béthune expose ici cinq des projets menés au sein de cet atelier (de la maternelle au collège).
Notre artiste est " née au siècle dernier ", comme elle le précise, et s’est inspirée des oeuvres en prose ou poésie d’Anaïs Nin, Alphonse Allais, Alain Bosquet et Guy de Maupassant, pour créer des " livres uniques ", des " livres sculptures ". Ces choix littéraires font planer une atmosphère un peu rétro et romantique. Pour ses " sculptures ", elle utilise avant tout les procédés de la gravure, mais mélange également différentes techniques, différents formats et supports. Nous pouvons ainsi contempler des eaux-fortes, des gravures sur plexiglas (notamment " Une petite fille au pays des senteurs ", 1998), des kakemonos, des livres en pliages labyrinthiques, des mini-livres, des livres dont la reliure est faite à partir d’un jeu de mikados, des manière noire...qui ne sont pas accrochés aux cimaises comme des œuvres d’art, ni rangés dans une bibliothèque, mais posés à même le sol, sur des petits meubles, dans des coffres, etc., comme de véritables objets à part entière. Cet aspect de l’objet-livre, auquel elle a rendu toute sa matérialité et dont elle a développé l’esthétique -à tel point que ces objets-livres sont devenus des livres-objets- nous amène à redéfinir ce qu’est un livre. L’auteur nous en livre sa définition : " le livre est un ensemble d’éléments. Libre à soi de les perturber, de les amplifier de manière inattendue ou de les réduire à l’infime. Libre à soi d’en trahir le sens. Métaphore humaine par idéal, il est une promesse de mémoire, une parabole. Il s’offre au regard de l’autre, à la confrontation, à l’ironie, à la complaisance. " Ainsi l’appropriation du lecteur d’un livre ne passerait pas seulement par la lecture de son contenu, mais par la manipulation (pour preuve, les gants blancs qu’on nous invite à enfiler dans l’espace d’exposition afin de pouvoir tourner dans tous les sens les œuvres sans crainte de les abîmer), le toucher, la transformation, et le lecteur en deviendrait à son tour l’auteur. Un livre ne serait jamais terminé, toujours en mouvement, ouvert à tous les possibles de l’imaginaire.
La gravure, que M.-C. Bourven qualifie d’ " art de la scarification ", rend compte de l’aspect physique dans la conception du livre-objet : " c’est la plaque de gravure qui concentre et recueille l’ensemble des empreintes et stigmates de son auteur ". De plus, par le biais de son jeu de répétitions originel, la gravure est propice à ce " mouvement " du livre : " le monde griffonné en miroir s’y déroule par étapes successives, en fragments de vie. Un monde en clair-obscur, en demi-teinte, en manière noire... "
P.S.: Je n'ai pas été autorisée à prendre des photos, mais on peut utiliser les marque-pages de toutes les expositions sur ce thème autant qu'on veut, puisqu'ils sont avant tout instruments de diffusion. Laurence, Dana et Agnès ont aussi leur témoignage à apporter sur cette exposition.Ce que j'en ai lu était d'ailleurs mieux écrit que moi...
Ecrit par solenne, le Mardi 23 Novembre 2004, 13:11 dans la rubrique "Le projet "Objet Livre"".